Quelques principes sur les histoires de vie

Une définition

Gaston PINEAU et Jean-Louis LE GRAND proposent une définition de référence : « L’histoire de vie est définie comme recherche et construction de sens à partir de faits temporels personnels, elle engage un processus d’expression de l’expérience. »

Un philosophe, Paul Ricoeur, parle aussi d’« identité narrative ».

Des faits jusqu’à la quête de sens

D’abord on regarde sa vie comme un ensemble de faits, d’événements. Mais l’enjeu est d’ordonner, de repérer l’essentiel, de trouver le fil conducteur dans le désordre et la turbulence. Il y a une forme d’aboutissement quand on trouve sens. Cette posture réflexive permet d’avancer :

  • des faits, des événements, « le matériau brut »
  • au ressenti, aux impressions, aux émotions, à ce que ça fait
  • jusqu’à ce que j’en apprends, en quoi ça me relie à moi-même, aux autres, au monde, ce qu’on peut en faire.

Quand il y a médiation du récit, par l’écrit souvent, la réflexivité est à deux temps : une parole auto-réflexive liée à la narration elle-même et une parole réflexive par la découverte de l’écrit, effet miroir, mise à distance. La vie et l’écriture de la vie se combinent pour donner forme et sens.

La traduction : travail de passeur

Le dictionnaire dit que traduire « c’est faire passer un texte d’une langue dans une autre ». C’est exactement le cas ici, il faut passer de la langue orale à la langue écrite. Dans le cadre d’une transmission à un tiers destinataire, donc dans un acte de communication, le biographe a le devoir d’adapter le récit oral, donc de le traduire, en utilisant les règles de l’écrit. « Traducere » veut dire en latin « faire passer ». Sur le fond comme sur la forme, le narrataire est le passeur de la rive du narrateur à la rive du destinataire. Il doit vraiment tenir compte du second pour être pleinement du service du premier.

A chacun sa vérité

On imagine facilement que deux personnes qui ont vécu le même événement ne vont pas le raconter exactement de la même façon, surtout avec l’œuvre du temps, surtout si ce sont des événements qui ont une forte charge affective ou émotionnelle.

Dans les récits de vie, il n’y a pas de recherche de vérité absolue, vaine quête. Le récit appartient au narrateur. Ses paroles disent ce qu’il a recomposé dans sa mémoire, ce qu’il retient, ce qu’il veut garder. C’est son affaire. Le biographe reçoit ses paroles, il les respecte comme telles. Ce qui est raconté par le narrateur est « vu de sa fenêtre ». La fenêtre d’un autre ne donne pas tout à fait sur le même paysage. Aucune des fenêtres n’a tort ou raison !